Les professionnels de la filière demandent :
• Des objectifs clairs de réduction des émissions de Gaz à Effet de Serre dans le cadre du plan de relance de la construction,
• Des règles transparentes et équitables pour le calcul du bilan carbone des matériaux dans la future Réglementation environnementale « RE2020 »
Le Haut Conseil pour le climat estime, dans son rapport annuel rendu public aujourd'hui, que la réduction des émissions de gaz à effet de serre reste insuffisante en France pour respecter la trajectoire de neutralité carbone du pays d'ici à 2050 et identifie plusieurs mesures pour y remédier.
Les professionnels de la filière bois partagent ce constat et estiment que leur matériau n'est pas assez utilisé dans le secteur de la construction alors même que la forêt française est un levier immédiat facile à activer en particulier à la lumière des défis du marché de la construction appelée à transformer radicalement son modèle économique actuel très émetteur de carbone. En effet, plus de bois dans la construction en structure et aménagement, serait une réponse locale simple, efficace et économique car durable grâce à la recyclabilité même du matériau, pour contribuer à atteindre les objectifs de neutralité carbone de la France.
Le secteur du bâtiment est l'un des principaux émetteurs de gaz à effet de serre (GES).
S'agissant de la construction et la rénovation, le choix des matériaux est déterminant pour atteindre l'objectif de neutralité carbone des bâtiments que la France s'est fixé pour 2050.
Le bois et les matériaux biosourcés, matériaux naturellement bas carbone, ont un rôle central à jouer pour relever ce défi mais ne semblent pas aujourd'hui être suffisamment pris en compte par les acteurs de la construction et de la rénovation. Pourtant, l'objectif intermédiaire de -40% d'émissions de GES en 2030 par rapport à 1990 arrive à grands pas.
Le bois et les matériaux biosourcés offrent la possibilité de répondre aux ambitions de la France dans le temps.
En effet, bois et forêts stockent du carbone au lieu d'en produire et on estime qu'ils permettent ainsi de décarboner la France d'environ 26 % de ses GES. Si l'utilisation des produits bois dans le bâtiment doublait (4,2 millions de tonnes actuels à 10 millions), le bâtiment pourrait réduire ses émissions de GES de 30% par an, soit 11 millions de tonnes de CO2 en moins[1] chaque année.
C'est pourquoi la filière bois demande que le plan de relance de la construction actuellement en discussion impose des objectifs clairs de réduction des émissions de Gaz à Effet de Serre (GES), au travers de principes de transparence et d'équité identiques pour tous et répondant à l'exigence de décarbonation. Cette exigence doit aussi se traduire dans la future Réglementation environnementale « RE2020 », qui orientera les constructions et rénovations de demain.
Des dysfonctionnements dans les méthodes de calcul des matériaux bas carbone
Les prochains Jeux Olympiques de Paris 2024 constituent un test grandeur nature pour les constructions bas carbone et laissent craindre un recours encore trop marqué à des procédés de construction émissifs... Ils révèlent de réels dysfonctionnements dans les calculs de l'empreinte carbone des matériaux de construction.
Certains ne prennent pas totalement en compte les gaz à effet de serre (GES) dégagés lors de leur fabrication. Ainsi les émissions dans l'air dues aux combustibles utilisés, de type pneus et huiles usagés, pour produire le ciment bas carbone ne sont pas prises en compte dans l'Analyse de Cycle de Vie des ciments, ni celles des co-produits (laitiers de hauts fourneaux) intégrés pour promouvoir des fabrications de ciments pourtant dites « bas carbone ». Une erreur qui réduit en particulier jusqu'à 20 % l'impact carbone du ciment dit bas carbone par rapport à la réalité.
Face à ces allégations trompeuses, le bois et les matériaux biosourcés ne peuvent pas faire valoir leurs atouts pour que les décideurs puissent procéder à des choix éclairés entre les différents matériaux de construction. La filière bois considère ainsi qu'en raison des calculs sous évaluant les émissions nettes des GES des ciments dits bas carbone, le bois ne semble pas prendre la part qu'il devrait avoir dans les constructions olympiques malgré son empreinte carbone réduite. Les professionnels du bois s'inquiètent de ces choix qui pourraient peser lourd sur le bilan carbone des JO 2024 alors que la France s'est engagée à réduire l'empreinte carbone globale des JO de 50 % par rapport à ceux de Londres de 2012 et de 30 % pour la construction des bâtiments.
Luc Charmasson, Président du Comité Stratégique de la Filière Bois (CSF), précise : « Notre filière bois ne lutte pas à armes égales avec les autres matériaux de construction. Bien sûr, tous les matériaux travaillent aujourd'hui à diminuer leur impact carbone et c'est louable. Cependant, il faut que nous nous mettions d'accord sur les méthodes de calcul. Elles doivent être équitables, sinon, aucun comparatif n'est possible et les bons choix ne pourront pas être faits pour que la France atteigne la neutralité carbone en 2050. Si nous prenons le cas du ciment bas carbone, les émissions dans l'air de son procédé de fabrication ne sont pas intégralement prises en compte. Il est pourtant fabriqué en chauffant à très haute température, plus de 1400 °C, deux matières fossiles que sont le calcaire et l'argile. À l'inverse, le bois est une matière renouvelable, qui pousse naturellement dans les forêts et surtout, stocke du carbone... En valorisant le bois, la filière Forêt-Bois est consciente de sa responsabilité en matière de gestion raisonnée de la forêt française, enjeu majeur de la richesse nationale. Prenons en compte l'empreinte carbone des matériaux de construction dès leur production ! Remettons les méthodes de calcul à plat. L'enjeu de décarbonation est capital, il en va de la lutte contre le réchauffement climatique et de l'exemplarité de la France en matière d'innovation. »
Transparence / incitation / obligation : trois actions clés pour relever le défi des constructions bas carbone
Afin que le bois et les matériaux biosourcés puissent contribuer à atteindre l'objectif de neutralité carbone de la France d'ici 2050, les professionnels de la filière bois appellent à la mobilisation urgente de tous les acteurs du secteur du bâtiment à travers trois actions clés :
• La transparence des calculs de l'impact carbone des matériaux pour établir des comparatifs équitables. Tous les matériaux doivent utiliser les mêmes méthodes de calcul afin de quantifier leur impact carbone déclaré dans les Fiches de Déclaration Environnementale et Sanitaire (FDES). Aujourd'hui, cela n'est pas le cas puisque, pour certains composants minéraux, les données relatives aux GES émis lors de l'étape de fabrication, et parfois tout au long de la vie du bâtiment, ne sont pas correctement prises en compte. De plus, la filière bois souhaite, comme elle le fait, que tous les matériaux dits bas carbone soient en mesure de fournir la preuve de cette allégation. Pour sa part, c'est à travers son outil « France Bois Traçabilité », qu'elle informe les promoteurs-constructeurs sur ses bois d'origine française et en provenance de forêts gérées durablement. Elle souhaite que cette démarche vertueuse soit étendue à tous les matériaux.
• L'incitation à la labellisation des bâtiments pour qualifier de façon crédible leur participation à la réduction des GES : l'utilisation du Label « Bâtiment Biosourcé » va en ce sens. La formation des élus et des décideurs doit également être un axe fort.
• L'obligation d'intégrer des exigences fortes dans le domaine des matériaux carbone dans la Règlementation Environnementale 2020 (RE2020), en particulier un plafond pour les émissions de gaz à effet de serre et un seuil pour le stockage du carbone de l'atmosphère dans les matériaux de construction et de rénovation.
Le bois dans la construction et la rénovation : le choix du bas carbone vert
Faire le choix du bois dans le domaine de la construction et de la rénovation relève d'une démarche responsable et durable. Outre l'avantage d'être renouvelable, son empreinte carbone est en effet particulièrement faible puisqu'il présente le double avantage d'être moins émissif pendant sa phase de fabrication et de stocker du carbone sur l'ensemble de son cycle de vie qui peut être très long. Le bois permet ainsi de lutter contre le réchauffement climatique. En forêt, les arbres absorbent le carbone grâce au phénomène naturel de la photosynthèse. Moins énergivore pour sa transformation, une fois coupé et utilisé dans les constructions, le bois continue de stocker ce carbone emmagasiné.
De plus, l'utilisation du bois dans la construction et la rénovation permet de préserver des ressources épuisables de la planète utilisées dans d'autres matériaux de construction. Son utilisation permet aux forêts de se développer en coupant les arbres matures pour laisser la place aux jeunes pousses qui capteront à leur tour du carbone. La gestion durable des forêts permet d'entretenir les poumons de la planète.
Photo : DR Yurii Romanov by Burst / Auteur : DR Conseil National de l’industrie